Julie Denayer (RTL) “Les sugar daddies, ça concerne 16 000 étudiantes en Belgique”
“Hey les étudiantes, pour améliorer votre style de vie, sortez avec un sugar daddy!” proclament des panneaux publicitaires à proximité des campus. Julie Denayer a justement consacré à cette prostitution 2.0 le premier numéro de son émission d’investigation “Face Cachée” (sur RTL).
Ça se passe pour de vrai, en Belgique!
Depuis lundi, on ne parle que de cela. De cette publicité qui incite les étudiantes à arrondir leurs fins de mois en rencontrant online des hommes “riches” prêts à rémunérer leur compagnie. Et, sous-entendu bien entendu, plus si affinités. Le sujet, Julie Denayer le connaît en profondeur. Elle a enquêté, rencontré les jeunes filles, pour cette nouvelle émission, Face Cachée, qui investigue sur des sujets tabous: “Je ne suis pas étonnée par cette campagne de pub. On a choisi ce sujet parce qu’on savait que ça existait. C’est inimaginable mais vrai: ce genre de site a pignon sur rue! Et on n’en parlait pas assez. C’est choquant, que cela existe chez nous.”
Comment les gens ont-ils réagi en découvrant l’existence des sugar daddies?
Julie Denayer: “Les gens sont choqués. Ce qui les frappe surtout, c’est de découvrir que ça se passe chez nous. Pas aux USA. Sur nos campus, il y a des jeunes filles qui vendent leurs corps pour payer leurs études. Et ça n’est pas marginal. Ça concerne 16 000 étudiantes. Toutes ne vont pas jusqu’au bout mais ça reste énorme!”
Comment expliquez-vous l’ampleur du phénomène?
Julie Denayer: “C’est d’abord un effet de la crise et de la précarisation croissante dans notre société. Ensuite, c’est de la prostitution 2.0. Tout passe par le web. C’est plus facile, plus immédiat. Il suffit de pouvoir se connecter, de se créer un profil, puis de faire ses premières rencontres… C’est plus accessible. Mais pas plus anodin. Lors de notre enquête pour Face Cachée, nous avons rencontré Viviane Teitelbaum, présidente du Conseil des Femmes francophones de Belgique. Elle nous a donné ce chiffre terrible: 60 % des personnes qui s’adonnent à la prostitution subissent un viol. Il faut absolument faire de la prévention, c’est horrible!”
Qui est coupable?
Julie Denayer: “Les fournisseurs et les clients sont coupables, différemment. Les propriétaires des sites qui disent qu’ils ne s’agit pas de prostitution, qui prétendent qu’il n’y a pas d’échange d’argent sont des hypocrites! Ce sont des relations tarifées, qu’on parle d’argent ou de cadeaux. Quant aux clients, évidemment, ils sont coupables: ce sont des hommes qui rencontrent des jeunes filles, parfois de 15-16 ans, contre de l’argent!”
Il faut faire bouger les choses
Nous ne publierons pas la publicité incriminée, parce que nous ne voulons pas offrir une publicité de plus à ce nauséabond site de “rencontres”. La Région bruxelloise a d’ailleurs officiellement interdit la campagne sur son territoire. Mais ne pas en parler ne supprime pas le problème. Les sites existent toujours. Les clients sont toujours prêts à profiter de la détresse des jeunes filles. Commençons déjà par battre en brèche l’imagerie Kardashian que nous véhicule Hollywood. Ces étudiantes ne recherchent pas des cadeaux, elles ne sont pas des call-girls glamour de série télé. Pour la plupart, elles rament entre les bourses et les aides insuffisantes… Leur “sugar daddy” paie leurs études. N’est-ce pas plutôt le rôle de la société?
Jusqu’au 29/09, vous pouvez revoir l’émission Face Cachée consacrée au sujet sur le site de RTL.