Une semaine dans les coulisses d’une agence matrimoniale
Depuis le Covid, les agences matrimoniales connaissent un nouveau rebond. L’une d’elles, Atoutcoeurs, a accepté de nous ouvrir ses portes pendant une semaine.
On les a longtemps dites vieillottes et dépassées. Pourtant, les agences matrimoniales ont résisté face à l’essor des sites et des applications de rencontre. Easys, Datelove, Atoutcoeurs, A2, DuoLove, Belunion, Étincelles d’Amour… Elles sont aujourd’hui de plus en plus nombreuses à proposer leurs services aux célibataires. Depuis la pandémie et la solitude générée par les confinements, elles enregistrent même des records d’adhésion. “Beaucoup de personnes se tournent vers nous après avoir écumé les applications, confirme Sabine Pasquier, consultante au sein de l’agence Atoutcoeurs, présente sur toute la Belgique. Il y a à la fois de la désillusion par rapport à des rencontres qui n’ont pas abouti sur quelque chose de sérieux, le besoin de briser la solitude, mais aussi l’envie de déléguer cette tâche. Rencontrer l’âme sœur, c’est énergivore. Quand on n’a ni le temps ni les occasions, il est plus facile de recourir à une agence”.
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Un gage de sérieux
Les agences matrimoniales ont su se repositionner, se moderniser. Jadis, elles accueillaient uniquement des hommes et des femmes prêts à se marier. Aujourd’hui, elles sont à l’écoute de tous les désirs et ouvertes à la rencontre au sens large. “Les agences ont été dépoussiérées, reconnaît Sabine Pasquier. Le couple a plusieurs visages aujourd’hui. Beaucoup de gens ont envie de partager des loisirs, de partir en citytrip dans un cadre amoureux sans forcément habiter sous le même toit: nous essayons d’apporter une réponse positive à ces nouveaux objectifs de vie”.
Enfin, et cela n’est pas nouveau, les agences matrimoniales apparaissent toujours comme un gage de sérieux. Sarah, 40 ans, s’est d’ailleurs tournée vers l’une d’elles pour cette raison: “Lors de l’inscription, il est nécessaire de fournir une copie de la carte d’identité, une preuve de composition du foyer, un extrait de casier judiciaire et une déclaration sur l’honneur. Ce sont des éléments qui, en plus d’un suivi scrupuleux et de l’engagement financier, me rassurent et me font me dire que je ne vais normalement pas tomber sur des personnes douteuses. J’aborde la rencontre avec plus de confiance, en sachant que l’autre a les mêmes intentions et souhaits que moi”. Car l’un des critères sur lesquels les agences ne transigent pas, c’est bien l’honnêteté: ceux qui mentent sur leur statut sentimental et ne recherchent que des histoires d’un soir, à coup de fausses identités, sont vite démasqués et congédiés.
Lundi: définir ses attentes
En ce lundi pluvieux, Sabine Pasquier a rendez-vous avec Florence autour d’un thé. Blonde, la cinquantaine, cette jolie dentiste souffre de solitude, depuis que ses enfants ont quitté la maison. Toutes deux se sont déjà longuement entretenues par téléphone, après une prise de contact via le site de l’agence. Le premier pas est compliqué: confier son manque d’épanouissement personnel, ainsi que ses attentes à quelqu’un que l’on ne connaît pas est toujours délicat. Le stress est quasi palpable mais les multiples questions de Sabine sur son histoire sentimentale, ses centres d’intérêt, ses critères, achèvent de détendre Florence, qui repart avec le sourire. “À moi maintenant de bien travailler!”, lance gaiement Sabine.
Une fois l’entretien terminé et le contrat signé, la consultante bâtit le profil de la personne idéale pour Florence. “Parfois, il me vient immédiatement en tête l’image d’une personne qui pourrait correspondre. Si ce n’est pas le cas, un programme informatique me permet ensuite de croiser ces critères de recherche avec ceux de tous nos clients. Notre base de données contient plus d’une centaine de membres: 60% de femmes contre 40% d’hommes environ, allant de 30 à plus de 80 ans”. Les profils proposés changent sans cesse. Chaque jour apporte en effet son lot de nouvelles demandes ou inscriptions. “Cela permet de proposer de nouvelles rencontres trois semaines ou un mois plus tard si l’on n’a pas d’emblée la personne qui convient”, glisse la consultante. Du côté de Florence, la deuxième rencontre fut la bonne. Et Sabine est régulièrement tenue au courant de cette histoire qui n’en est encore qu’à ses débuts.
Mardi: se donner une deuxième chance
Le mardi, c’est une histoire émouvante qui attend notre spécialiste de l’amour. Entre deux gestions de dossiers, Sabine reçoit Michel, 70 ans. Trois ans se sont écoulés depuis le décès de son épouse et il souhaite aujourd’hui trouver une compagne avec laquelle il pourra partager de beaux moments de vie. Généreux, animé de belles valeurs, Michel aimerait se rendre à des expositions, à des conférences, voyager à deux, mais aussi choyer sa future compagne. Il confie ses espoirs à Sabine qui l’écoute avec patience. “C’est un métier qui cueille les confidences et qui exige donc de prendre le temps, précise-t-elle. Je ne suis pas une psychologue et me garde bien de donner des conseils amoureux. Par contre, je peux écouter, guider parfois vers un choix, aider mes clients à se préparer avant la rencontre, débriefer ensuite avec eux pour les aider à comprendre ce qui s’est passé. C’est cet accompagnement qui fait que l’on choisit une agence”.
Le premier rendez-vous est trop stressant, trop plein d’attentes: chacun vient et dépose ses bagages
Pour chacun, Sabine s’applique à faire du sur-mesure. “J’aime rendre les gens heureux et mon cœur palpite en même temps que celui de mes clients!”. Le coup de foudre ne se produit pas toujours au premier regard, mais la consultante insiste toujours pour qu’un second rendez-vous ait lieu. “Le premier rendez-vous est trop stressant, trop plein d’attentes: chacun vient et dépose ses bagages. Une fois que c’est fait, le deuxième rendez-vous est souvent plus serein. Et mieux vaut une histoire qui se construit solidement, dans la durée, plutôt qu’un coup de foudre qui ne dure pas”.
Michel l’a bien compris et s’est donné du temps pour aller de l’avant. Il a rencontré plusieurs femmes et fréquente l’une d’entre elles, avec qui il partage de nombreux points communs, depuis quelques semaines.
Mercredi et jeudi: s’investir dans la rencontre
Mercredi, Sabine rencontre Claire Mottart, fondatrice de l’agence, et échange avec elle sur la pertinence de certaines mises en contact. Jeudi, c’est Nicole, 63 ans, qu’elle prend sous son aile. La soixantenaire a vécu un divorce compliqué et c’est en larmes qu’elle s’épanche sur son parcours sentimental. Elle en a assez de la solitude et aimerait se faire un cadeau: la recherche en toute discrétion d’un compagnon aimant, qu’elle chérit déjà. “Nicole fait partie de ces personnes qui savent ce qu’elles veulent et surtout ce qu’elles ne veulent plus. Elle se donne aussi les moyens d’aller vers le changement, ce qui n’est pas le cas pour tous nos clients…”, confie la consultante. Certaines personnes sont en effet indécises ou inconstantes dans les critères donnés, ce qui ne facilite pas les recherches et occasionne des déceptions lors de la rencontre.
Parmi les clients les plus difficiles: les carriéristes, ceux qui veulent rencontrer l’amour avec un grand A sans rien modifier de leur vie passée entre quatre avions. “À toutes ces personnes, je répète que je ne suis pas une magicienne et que je n’ai pas les pleins pouvoirs, insiste Sabine Pasquier. Chacun doit s’investir dans la rencontre pour que cela fonctionne. De mon côté, je mets en relation deux personnes qui peuvent se correspondre, mais je ne peux pas contrôler les vibrations qu’il y a entre elles. Parfois il y a une alchimie, parfois non, c’est assez imprévisible”.
Ne pas fermer la porte
La plupart des agences fonctionnent sur le principe d’un engagement: chez Atoutcoeurs, le suivi dure entre trois mois et un an, et comporte un certain nombre de rencontres, jusqu’à ce que la “bonne” personne se présente. En moyenne, 80% des inscrits ont droit à leur happy end, mais on ne peut jamais prédire la longévité de leur histoire et dans tous les cas, le contrat ne prévoit pas “une obligation de résultat”, tient à souligner la consultante. Sur les conseils de Sabine, Nicole a ainsi accepté de redonner une chance à son premier rendez-vous. Plus détendue la seconde fois, elle a finalement décidé de continuer à fréquenter l’homme qui lui a été présenté. “En douceur” cependant, pour se donner le temps de mieux se connaître mutuellement.
Vendredi: la plus belle des récompenses
Vendredi enfin, Sabine revoit Cédric, 48 ans. Ce bel homme souriant a beaucoup voyagé et se dit prêt maintenant à se poser, si possible avec une femme qui a déjà des enfants. Il adore les réunions de famille, les grandes tablées et donne carte blanche à Sabine qui saute intérieurement de joie: avec son allure, son charme et son esprit ouvert, elle sait déjà qu’elle a quelques bons profils pour lui… De fait, si les deux premières rencontres ne suscitent pas l’étincelle tant attendue, la troisième se révèle prometteuse. “Ils ont décidé de se donner une chance, alors je croise les doigts!”, sourit la jeune femme qui n’en est pas à son premier coup d’essai.
On ne regrette jamais d’avoir pris le temps de penser à soi
Depuis huit ans qu’elle joue les entremetteuses, Sabine Pasquier a en tête un joli paquet d’histoires qu’elle a plaisir à évoquer. “La plus belle récompense pour moi, c’est de recevoir en fin d’année des selfies envoyés par les couples que j’ai formés. Parfois, il me parvient aussi des faire-part de mariage ou de naissance: cela fait toujours chaud au cœur de voir que je ne me suis pas trompée en accomplissant ma mission”.
À tous les sceptiques qui préfèrent croire à la magie du hasard ou qui hésitent encore à sauter le pas, Sabine Pasquier n’a qu’une réponse à apporter: “On ne regrette jamais d’avoir pris le temps de penser à soi”.
Combien ça coûte?
Cela ne vous surprendra pas: rencontrer le grand amour via un intermédiaire n’est pas donné! Selon les agences et le type d’engagement, il faut compter entre 1500 et 6000€. Une somme, payable en plusieurs fois, qui teste à la fois la motivation et le sérieux des candidats, qui rassure ceux qui craignent de tomber sur quelqu’un qui n’en voudrait qu’à leur argent, mais qui garantit aussi une certaine confidentialité: ici, l’anonymat est complet et les coordonnées protégées.
Texte: Ariane Langlois. Adaptation Web: Justine Leupe.
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