Cultiver de la vigne dans son jardin, c’est possible!
La vigne nouvelle est arrivée et mérite une place de choix dans nos jardins. Aujourd’hui, plus besoin de serre et de produits chimiques pour obtenir d’excellents raisins blancs ou rouges!
La culture de la vigne dans nos jardins est aujourd’hui assez simple. Plus question, comme on le faisait trop souvent autrefois, d’introduire des plantes qui supportent mal nos conditions climatiques ou qui nécessitent des traitements chimiques.
Des cépages adaptés à nos régions
Il est aujourd’hui plus facile de cultiver la vigne en Belgique. D’après Michel Pierson, professeur et responsable du département arboriculture au Centre technique horticole de Gembloux, cela s’explique par le climat plus chaud et de nouveaux cépages mieux adaptés à nos régions et davantage résistants. Ces cépages, dits “interspécifiques”, sont issus de multiples croisements de vignes de l’espèce européenne, Vitis vinifera (qui fait des grands vins mais qui sont sensibles aux maladies) et plusieurs espèces américaines naturellement plus résistantes.
Lorsque l’on décide d’intégrer une vigne à son jardin, le choix du cépage est donc primordial. Michel Pierson conseille: “Mieux vaut s’adresser à un pépiniériste très sérieux afin d’être certain que le pied de vigne acheté est de bonne qualité et correspond bien au cépage demandé. On voit encore sur le marché beaucoup trop de vignes non résistantes aux maladies. Pour se passer de produits phytosanitaires, le principe essentiel est de choisir les variétés les plus résistantes.”
Les maladies de la vigne
Trois maladies affectent particulièrement les vignes.
- En juillet-août, le mildiou peut parfois apparaître quand il fait trop humide.
- L’oïdium peut arriver quand il fait trop sec.
- Le botrytis, ou pourriture grise, survient le plus souvent en septembre.
“On évite beaucoup de problèmes de botrytis en éliminant directement les grains attaqués par les guêpes et tout ce qui pourrit au sein des grappes”, conseille Michel Pierson. “On peut éventuellement prévenir l’apparition du mildiou et de l’oïdium en appliquant respectivement du cuivre et du soufre, produits autorisés dans certaines limites en culture biologique.” La précaution principale est de toujours éviter que des vignes dites résistantes côtoient des vignes non résistantes.
Faire son vin
En petite quantité, il est difficile de faire du vin correctement. L’idéal est de s’associer à d’autres personnes pour cultiver une plus grande parcelle et investir dans du matériel de vinification performant. Si l’on veut néanmoins fabriquer du vin au départ des vignes d’un petit jardin, il faut au moins pouvoir en faire 20 litres par an. En Belgique, on peut raisonnablement espérer une production annuelle de 1,5 litre de vin par pied de vigne. Faites le calcul !
1. Foulage et pressage
- On récolte les grappes quand les raisins sont bien mûrs (mais pas trop).
- On élimine toutes les rafles (charpentes boisées des grappes) pour ne garder que les grains du raisin.
- Il faut ensuite “fouler” ceux-ci à l’aide de petits fouloirs mécaniques (à partir d’une centaine d’euros).
Pour le vin blanc, le raisin foulé doit reposer durant environ 24 heures (macération) puis être passé à la presse (on trouve des petites presses à partir d’une centaine d’euros). On obtient alors le moût.
2. Fermentation
- Avec un densimètre (moins de 10 €), on mesure la quantité de sucre que contient le moût. Sachant que 17 g de sucre par litre donnent 1 degré d’alcool, il faut 204 g de sucre pour obtenir un litre de vin alcoolisé à 12°. C’est le minimum conseillé pour obtenir un vin qui se conserve bien. La mesure prise avec le densimètre permet donc de calculer si un ajout de sucre au moût (on parle de chaptalisation) est nécessaire et en quelle quantité.
- Il faut ensuite ajouter une levure spécifique au type de vin que l’on souhaite obtenir. Ces levures sont vendues chez les marchands de matériel de vinification.
- À ce stade, on peut également ajouter du sulfite mais en quantité limitée (environ 1 g pour 10 l admis en vin bio). C’est un produit antioxydant et antibactérien que l’on utilise pour favoriser la conservation de nombreux produits alimentaires mais qui peut occasionner des effets indésirables.
- On place alors le mélange en cuve de fermentation, à l’abri de l’air. Il faut une température de plus de 15 °C pour démarrer la fermentation. Pour faire du vin blanc, l’idéal est de rester autour de 17 °C, pas beaucoup plus. La cuve de fermentation doit comprendre un bouchon bien étanche et un barboteur qui laisse sortir les gaz de fermentation sans laisser l’air entrer. La fermentation peut durer de quelques jours à plusieurs semaines.
3. Mise en bouteille
- Lorsque le barboteur ne laisse plus échapper aucun gaz, la fermentation est terminée. On laisse alors le vin reposer environ 2 mois.
- Un dépôt se crée au fond de la cuve, la lie.
- On transfère alors le vin sans la lie, par siphonnage dans une autre cuve où il doit rester à nouveau à l’abri de l’air.
- Deux mois plus tard, l’opération est répétée.
- À partir du mois de mai, environ, la mise en bouteille peut être effectuée.
- Pour le vin rouge, la mise en fermentation est effectuée après le foulage.
- Le pressage ne s’effectue qu’après la fermentation.
Rouge ou blanc?
Raisin rouge ou raisin blanc? De façon générale, le raisin blanc mûrit plus vite que le rouge, ce qui est une qualité intéressante pour un pays tempéré comme le nôtre. En raisin blanc, on trouve donc bon nombre de cépages adaptés à notre terroir mais certains raisins rouges peuvent également très bien convenir.
Parmi les cépages interspécifiques, voici quatre coups de cœur de Michel Pierson.
- En raisin de table blanc, Himrod (USA) donne un raisin sans pépins vraiment succulent et très hâtif.
- En raisin de table rouge, le muscat bleu (Suisse) est un cépage presque parfait à tous les niveaux.
- En raisin rouge de vinification, le Regent (Allemagne) est très résistant et donne du très bon vin rosé ou rouge.
- En raisin blanc de vinification, le Solaris (Allemagne) est déjà mûr au début du mois de septembre et est génétiquement incapable d’être atteint par le mildiou.
Soleil et drainage
Voici les conditions dont a besoin une vigne pour bien la planter:
- un sol bien drainé
- un emplacement ensoleillé (Sud et Sud-Est)
- idéalement placée contre un mur pour être à l’abri des intempéries et des vents froids
- un terrain avec une pente bien orientée
- le mettre en terre mi-avril, début mai
- le trou de plantation doit être assez grand (environ 50 cm de diamètre et 60 cm de profondeur)
- mélangez la terre de la partie inférieure du trou avec du sable du Rhin
- la partie supérieure peut être amendée avec du terreau ou du compost (2/3 de terre pour 1/3 d’amendement)
- le point de greffe du pied de vigne doit se situer une quinzaine de centimètres plus haut que le sol
- après le repiquage, on arrose copieusement (un gros arrosage par semaine vaut mieux que des petits arrosages journaliers)
- attachez la vigne pour la faire grimper sur une structure en bois ou des fils métalliques tendus horizontalement le long d’un mur ou entre des piquets
Les techniques de taille sont nombreuses et dépendent du support choisi pour faire évoluer la vigne. Un des principes de base est de ne jamais vouloir faire évoluer la plante trop vite. Pour bien démarrer cette culture, il est donc indispensable d’être épaulé par un spécialiste ou d’être bien documenté.
Pour rencontrer un pro: Philippe Grafé est le pionnier belge de l’utilisation de cépages interspécifiques pour élaborer du vin professionnellement. En 2002, il crée le vignoble du Domaine du Chenoy en région namuroise. Aujourd’hui, cette exploitation qui s’est lancée dans la production certifiée bio propose différents vins de qualité, mousseux, rouges, blancs et rosés. La preuve que les cépages interspécifiques peuvent donner d’excellents produits bio en Belgique. Infos: domaine-du-chenoy.com.
Sources: Benoît Huc et Renée Baguette
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