Tourisme spatial: prix, durée, bilan carbone… On fait le point!
On nous le répète depuis que Richard Branson et Jeff Bezos ont fait un saut dans l’espace: le tourisme spatial, c’est pour demain. Mais concrètement, à quoi est-ce que cela ressemblerait?
C’était le 15 septembre 2021: quatre touristes américains se sont envolés en orbite à bord d’un vaisseau de SpaceX, une compagnie fondée par le milliardaire Elon Musk, pour séjourner trois jours dans l’espace. C’est la première fois que ce genre de mission ne comporte aucun astronaute professionnel à bord… Le début d’une nouvelle ère?
“Un séjour dans l’espace émettra l’équivalent de 638 années d’émission d’une voiture parcourant 15.000km par an”
Combien ça coûte?
Virgin Galactic a vendu ses premiers billets entre 200.000 et 250.000 dollars, mais les prochains tickets devraient plutôt s’arracher à 450.000 dollars (soit plus de 380.000€). L’objectif de l’entreprise à terme: organiser 400 vols par an. Richard Branson prévoit un engouement permettant au prix de tomber “sous la barre des 100.000 dollars en 2030”. Ce qui représente quand même 92 fois la dépense moyenne d’un Belge pour ses vacances (si on se fie aux chiffres de l’Association belge des tours opérateurs), mais à ce prix-là, on vous laisse garder la combinaison de spationaute.
Quant à Jeff Bezos, le patron d’Amazon, il a vendu le billet pour l’accompagner dans l’espace en juillet à bord de New Shepard aux enchères pour… 28 millions de dollars. Il y a quelques semaines, il déclarait que la société Blue Origin avait déjà vendu pour plus de 85 millions d’euros de billets pour l’espace. Sur ce coup-là, le géant américain ne semble pas jouer la carte du low cost.
Où part-on exactement?
Pas vraiment dans l’espace en fait, si vous voyagez avec Virgin Galactic… En effet, c’est la ligne de Kármán qui définit officiellement la limite entre l’atmosphère terrestre et l’espace, et elle se situe à 100km au-dessus de nos têtes. Richard Branson n’est monté “que” à 90km (soit quand même “dans l’espace” d’après l’US Air Force qui fixe la limite à 80km). Le New Shepard de Bezos est allé jusqu’à 107km. Dans tous les cas, gageons que la vue par le hublot vaut le déplacement. L’expérience a même son propre nom: l’overview effect ou l’effet de surplomb qui correspond au fait de voir la Terre depuis l’espace et de prendre conscience de la fragilité de notre planète.
Combien de temps dure le voyage?
L’avantage c’est qu’il est inutile de poser tous vos jours de congés payés pour vivre cette expérience hors du commun. Le vol suborbital opéré par Virgin dure à peine 70‑90 minutes. Si on ajoute l’entraînement express et le vol pour les États-Unis, c’est l’histoire d’une petite semaine. Durant le vol, il est possible d’expérimenter la microgravité durant quelques minutes, une gravité tellement faible qu’il est possible de flotter en apesanteur.
La to-do list avant le départ
Beth Moses, responsable de la formation des touristes-astronautes pour Virgin Galactic, a donné quelques détails sur l’entraînement prévu avant d’embarquer (en plus d’un bon check-up). Il s’étale sur 3 jours.
- Jour 1: focus sur la tenue, l’équipement, les moyens de communication… et test G-force, aussi connu sous le nom de test de la centrifugeuse (ça fait envie). C’est un peu comme le Rotor de la foire, mais en pire. Il s’agit de vérifier la résistance aux accélérations rapides qui soumettent le corps à une gravité plus importante que sur Terre.
- Jour 2: point sur la cabine, les autres passagers et la vue durant le trajet (pour ne pas perdre quelques précieuses minutes à se demander où se trouve le nord!).
- Jour 3: team building et répétition générale, et vous voilà parée pour le décollage au jour 4.
Où dort-on?
Quitte à faire le déplacement, autant passer au moins une nuit sur place, non? La NASA ayant décidé d’envoyer des civils dans la Station spatiale internationale, il lui fallait une sorte de capsule hôtel. La société Axiom Space a été missionnée et c’est Philippe Starck qui a été chargé du design de ses 8 cabines individuelles avec vue sur Terre. Il a misé sur un espace blanc entièrement capitonné aux airs de cellule d’isolement psychiatrique. La somme de 55 millions de dollars est évoquée pour un séjour de 10 jours à 400km d’altitude (en 2024). Les vols jusqu’à “l’hôtel” seront opérés par le SpaceX d’Elon Musk.
Quel bilan carbone?
D’après les données officielles, le SpaceShip Two de Virgin aurait émis 27 tonnes de CO2, soit 4,5 tonnes par passager. C’est plus ou moins l’équivalent d’un aller-retour Bruxelles-Sydney, mais c’est surtout bien plus que l’émission annuelle recommandée pour limiter la casse sur le front du changement climatique. Trois chercheurs (R. Lehoucq, E. Rio et F. Graner) ont estimé qu’un vol vers l’ISS pour un vrai séjour dans l’espace émettra “1150 tonnes de CO2, l’équivalent de 638 ans d’émission d’une voiture moyenne parcourant 15.000 km par an”. On veut bien croire que l’overview effect renforce l’engagement écologique, mais il est sûrement plus efficace de comprendre qu’il faut préserver la planète en feuilletant l’album photo de Thomas Pesquet ou en se baladant en forêt…
Nos plans B
Après avoir fait les calculs, on se dit que, finalement, notre premier vol dans l’espace, ce n’est pas pour demain. Quelles pourraient être les alternatives amusantes?
- Pour 6000€: Novespace opère des vols “Zéro G” au départ de Bordeaux-Mérignac. Durant environ 1h, le pilote enchaîne 15 paraboles qui permettent de découvrir l’état d’apesanteur et de rejouer par exemple les petits bons de Neil Armstrong sur la Lune.
- Pour 25€: pourquoi traverser l’Atlantique alors qu’on peut se rendre sur la base de lancement de l’Euro Space Center dans la province du Luxembourg? Le centre propose l’incroyable Journée du Spationaute, une visite de 5h avec pas moins de 9 activités dont un saut en chute libre de 8m pour tester l’impesanteur (ce n’est pas l’apesanteur, mais c’est déjà pas mal), une expérience en VR qui donne l’impression de marcher sur Mars (et ça, même Thomas Pesquet ne l’a pas fait!) ou encore le Space Rotor pour être soumis à la force G, comme dans l’entraînement des astronautes.
Texte: Céline Fion
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