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Mutilations génitales féminines: nos professionnels de la santé trop peu formés

Par Justine Leupe

Les mutilations génitales sont tellement tabou que même les professionnels de la santé ne les connaissent pas et n’ont pas les bons réflexes face à une femme excisée. Le GAMS, Groupe pour l’Abolition des mutilations sexuelles féminines, se bat pour que des formations soient obligatoires pour les futurs médecins, sages-femmes, kinésithérapeutes…

En 2019, l’Institut pour l’égalité des hommes et des femmes publiait ses derniers chiffres concernant l’excision: “Au 31 décembre 2016 (…), 17.575 filles et femmes excisées vivent en Belgique et 8342 sont intactes mais à risque d’excision si aucun travail de prévention n’est effectué”.

Au vu de ces chiffres, il n’est pas rare qu’un gynécologue, pour un contrôle de routine ou pour un accouchement, soit confronté à une femme excisée. Non formé, ce professionnel de la santé ne sait pas toujours comment réagir et c’est un vrai problème.

Quels sont les risques d’une non-formation?

Lors du webinaire “Excision: quels défis pour les femmes concernées en Belgique?”, organisé par le GAMS le jeudi 4 février, Fabienne Richard, directrice du GAMS Belgique et sage-femme référente pour MGF (Mutilations Génitales Féminines) évoquait son combat: “Il faut former les gynécologues et sages-femmes pour que les femmes excisées n’accouchent pas automatiquement par césarienne”. Les accouchements par voie basse sont possibles mais demandent des connaissances. “Et puis, il faut un bon suivi, pour éviter toutes les complications liées à l’excision”.

C’est sur le terrain, en Somalie, que Fabienne Richard a dû apprendre son métier de sage-femme face à des filles et femmes excisées. “C’est lorsque je suis partie en Afrique avec MSF que j’ai ouvert les yeux sur la problématique de l’excision. Je n’en n’avais jamais entendu parler, ni même du clitoris lorsque j’ai fait mes études de sage-femme à Nantes, puis la médecine tropicale à Anvers en 1995”, précise la spécialiste. Elle se retrouve lâchée là, en Somalie, sans aucun savoir dans ce domaine. “C’est un vrai problème, car si on ne fait rien, c’est-à-dire que si on ne pratique pas une désinfibulation (une incision antérieure) chez une femme excisée, le bébé ne peut pas sortir et une déchirure des tissus peut survenir chez la mère. De plus, si le travail d’accouchement est trop long, les séquelles pour l’enfant et la mère sont énormes”.

Illustrations © Clarice d’après des croquis de Fabienne Richard

Plus d’infos: www.health.belgium.be

Le travail est encore long

Alors que Fabienne Richard regrette que MSF ne l’ait pas formée à la problématique de l’excision, aujourd’hui à la tête du GAMS, elle milite pour des formations obligatoires dans le cursus scolaire des futurs professionnels de la santé. Cela avance et petit à petit, les écoles et universités sont à l’écoute, mais le chemin est encore long.

Au-delà de la formation purement pratique, la sage-femme référente de Médecins Sans Frontières rappelle que des avancées doivent être faites au niveau de l’interculturalité. “Il faut apprendre à travailler sans juger. Finalement, ce n’est pas l’opération ou l’accouchement le plus difficile, mais le fait d’éviter le jugement face à ces femmes excisées, que ce soit les gynécologues, les psychologues ou même les traducteurs qui font le relais entre nous et ces femmes”.

La meilleure solution reste évidemment l’éradication de cette pratique et cela passe par de la prévention. “Les mutilations génitales féminines sont une conséquence de nos sociétés patriarcales, où naître femme reste un obstacle à l’émancipation dans certains pays”, rappelle Christie Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale, de l’Egalité des chances et des droits des femmes. Mais avant que cette pratique barbare disparaisse totalement, il est indispensable de l’apprivoiser en tant que professionnel de la santé pour éviter une douleur supplémentaire à ces femmes.

Pour en apprendre davantage sur l’excision: Vidéo: un documentaire pour mieux comprendre l’excision et l’enrayer

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