endométriose
Malgré les avancées, l’endométriose n’est pas encore reconnue comme pathologie chronique en Belgique. © Cottonbro/Pexels

L’endométriose: les douleurs, le diagnostic, les pistes de solution

Parfois très invalidante, l’endométriose est une maladie sous-estimée et sous-diagnostiquée, qui touche 10% des femmes en âge de procréer. Pourtant, des règles qui font mal, ce n’est pas normal.

Les douleurs dans le bas-ventre durant les règles sont le symptôme le plus fréquent de l’endométriose. Mais ce n’est pas le seul, comme nous l’explique la Dre Charlotte Maillard, du Service de gynécologie et d’andrologie des Cliniques universitaires Saint-Luc, à Bruxelles: “L’endométriose peut aussi causer des douleurs au moment des mictions – c’est la dysurie – et lors de la défécation, éventuellement associées à la présence de sang dans les selles. Mais aussi des douleurs pendant les rapports sexuels: la dyspareunie affecte plus de 50% des personnes atteintes d’endométriose…”

Pourquoi ces douleurs?

En cause, l’implantation anormale de fragments de tissu semblable à de l’endomètre à l’extérieur de l’utérus. “L’endomètre est la muqueuse qui recouvre la paroi intérieure de l’utérus. Selon la théorie expliquant les principales formes d’endométriose, des cellules endométriales profitent du flux menstruel pour migrer à travers les trompes dans la cavité péritonéale. Elles peuvent alors se greffer sur le péritoine, la fine membrane qui recouvre tous les organes intra-abdominaux, ou même infiltrer certains de ces organes, provoquant lésions, kystes et/ou nodules.”

Comment poser un diagnostic?

Les douleurs pendant les règles ne sont pas toujours causées par de l’endométriose, mais, “si elles ne passent pas avec des antalgiques simples ou un traitement hormonal destiné à éviter les règles, un bilan s’impose.” Le problème, c’est qu’il y a des patientes qui ont beaucoup de douleurs et peu d’endométriose, et d’autres qui ont beaucoup d’endométriose et peu de douleurs. Et, si un simple interrogatoire suffit parfois à poser le diagnostic, il arrive aussi que ni l’examen clinique, ni l’échographie ni la résonance magnétique ne révèlent l’endométriose et qu’il faille opérer pour en avoir le cœur net.

Un test salivaire est-il efficace?

“Heureusement, remarque la Dre Maillard, un test diagnostique salivaire, développé en France mais nécessitant encore des preuves scientifiques, permet d’obtenir, grâce à l’intelligence artificielle, une signature de l’endométriose basée sur 109 petits fragments d’ARN. D’après les études, les résultats seraient fiables à 99%!” Une bonne nouvelle pour les patientes qui pourraient être prises en charge dès le début de leur maladie, au lieu d’attendre parfois des années pour découvrir leur diagnostic. Même s’il n’existe toujours pas de traitement spécifique de l’endométriose.

Quels soins pour l’endométriose?

“L’endométriose est liée aux règles, souligne la Dre Maillard. Après la ménopause, elle est en repos, mais on ne peut pas mettre les patientes en ménopause trop jeunes, parce que cette mesure impacte la santé, notamment osseuse et cardiovasculaire. La meilleure stratégie est donc de stabiliser autant que possible la maladie jusqu’à la ménopause”, avance la spécialiste. Stratégie qui nécessite la création de cliniques de l’endométriose, dispensant des soins multidisciplinaires, comme le préconise le Centre fédéral d’Expertise des soins de santé.

Nous organisons des réunions mensuelles destinées à mettre au point la meilleure approche individualisée pour aider les patientes et soulager leurs symptômes

“L’idée est de discuter de chaque cas en équipe avec les chirurgiens gynécos, les gynécologues qui font de la procréation médicalement assistée, les anesthésistes algologues, les radiologues, les chirurgiens digestifs… précise la Dre Maillard. À Saint-Luc, dont le service de gynécologie et d’andrologie vient d’être reconnu par la Surgical Review Corporation américaine comme centre d’excellence multidisciplinaire pour l’endométriose, nous organisons des réunions mensuelles destinées à mettre au point la meilleure approche individualisée pour aider les patientes et soulager leurs symptômes.”

Les traitements contre l’endométriose

En leur proposant d’abord le traitement le moins invasif possible. “On commence toujours par un traitement antidouleur, puis un traitement hormonal destiné à bloquer les règles, explique la Dre Maillard. Si ça ne suffit pas, on se dirige vers la chirurgie. Les risques de récidive sont plus ou moins importants selon la localisation de l’endométriose: pour l’endométriose ovarienne, par exemple, ils sont de 10% à 2 ans… De plus, même après avoir été opérées, beaucoup de femmes ont besoin d’un traitement hormonal, ainsi que d’un soutien psychologique, voire sexologique. Des douleurs peuvent aussi persister…”

Le plus difficile reste d’expliquer à une femme atteinte d’endométriose pourquoi elle est touchée, et pas sa sœur, sa meilleure amie ou sa voisine. “Le reflux d’une partie du sang menstruel vers la cavité péritonéale se produit chez 90% des femmes. Alors, pourquoi l’endométriose ne se forme-t-elle que chez une femme sur 10? La réponse nous échappe encore.”

Qu’en est-il de la fertilité?

L’endométriose n’impacte pas toujours la fertilité. “Mais la présence de lésions d’endométriose dans le petit bassin peut créer des adhérences et une inflammation qui empêchent le développement d’une grossesse, remarque la Dre Maillard. Par ailleurs, l’endométriose ovarienne peut produire de gros kystes ou endométriomes sur les ovaires.” La chirurgie, souvent nécessaire pour empêcher ces kystes de grandir ou de se rompre spontanément, peut compromettre la fertilité. C’est pourquoi, en 2023, l’INAMI a transformé sa convention oncofreezing – permettant aux patientes qui doivent subir un traitement contre le cancer de bénéficier d’un remboursement pour la congélation de leurs ovocytes – en une convention freezing, assurant désormais le même remboursement aux patientes qui présentent une endométriose ovarienne bilatérale et doivent se faire opérer. Résultat: une fois débarrassées de leurs endométriomes, elles peuvent, si nécessaire, recourir à la procréation médicalement assistée.

Des progrès à faire

Malgré cette avancée, et les diverses résolutions votées en 2022, pour sensibiliser à l’endométriose et encourager la recherche, l’endométriose n’est pas encore reconnue comme pathologie chronique en Belgique. Le ministre fédéral de la Santé a annoncé récemment, à l’occasion de la Journée mondiale contre l’endométriose, le 28 mars, la mise en place d’un groupe de travail sur l’endométriose. “Mais certaines patientes nous disent encore qu’elles ont parfois l’impression de ne pas être écoutées par leurs médecins, constate la Dre Maillard. Il reste donc des progrès à faire, mais l’essentiel est que l’endométriose ne soit plus taboue. Les patientes n’ont plus peur de décrire leurs symptômes, et avoir mal pendant les règles n’est plus considéré comme normal.”

Aller plus loin:

Le site toimonendo.com, plein d’infos, dont les coordonnées des quelques cliniques (autoproclamées) d’endométriose en Belgique. Le Collège Royal des Gynécologues Obstétriciens de langue française: crgolfb.be/fr. La brochure de Question Santé à télécharger gratuitement. La BD Endogirls et son enquête passionnante sur l’endométriose, avec des témoignages bouleversants et des avis d’experts.

Texte: Marie-Françoise Dispa, coordination: Julie Braun.

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