Qu’est-ce que l’EVRAS, l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle?
Le terme d’EVRAS est principalement utilisé dans le milieu scolaire ou qui touche à l’éducation. Donc si votre enfant ou adolescent rentre de l’école et vous parle de l’acronyme EVRAS, ce n’est pas une formule scientifique, mais c’est qu’il a reçu un “cours” d’Éducation à la Vie Relationnelle, Affective et Sexuelle.
L’EVRAS, ce sont toutes les activités liées à l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle. Ces dernières sont souvent données au sein de l’école par des animateurs de plannings familiaux. Pour nous en parler, on a rencontré Lola Clavreul-Prat, responsable des centres wallons, de la défense politique en Région wallonne et chargée en éducation permanente pour la Fédération des Centres Pluralistes de Planning Familial.
L’EVRAS, ça fonctionne comment?
“L’EVRAS est une mission obligatoire inscrite dans les programmes scolaires depuis 2012 ou 2013. Mais les politiques ont juste oublié de définir ce que c’est et en quoi elle consiste. Aujourd’hui, les directeurs d’école peuvent se dire que mettre une affiche évoquant l’EVRAS dans un coin de l’école est suffisant puisqu’il n’y a aucune règle. Et puis, il y a d’autres écoles qui mettent en place des projets sur plusieurs années avec une cellule EVRAS à l’intérieur de l’école. Donc, il y a vraiment des réalités extrêmes. Cette éducation relationnelle, au sens large, fonctionne au bon vouloir des directions d’école et des sensibilités des directeurs et des réseaux”.
L’importance de parler des relations et de sexualité aux jeunes
“Nous (la Fédération des Centres Pluralistes de Planning Familial), on prône clairement le fait de parler d’EVRAS dès le plus jeune âge. Et puis, ce qui fait surtout peur, c’est le ‘S’ de EVRAS. Quand il faut parler de sexualité, on se demande toujours ce que cela va provoquer chez l’enfant. Il y a beaucoup d’angoisse de la part des adultes. Beaucoup de fausses croyances aussi. La plus courante est: ‘le fait de parler de sexualité va déclencher une sexualité précoce chez les ados’. Alors qu’en réalité, les études montrent que ce n’est pas le cas du tout. Au contraire, plus on commence à parler tôt de consentement, de sexualité, de contraception, plus l’entrée dans la vie sexuelle va se faire tard et avec davantage de précautions. Avec moins de prises de risques en tout cas. On retrouve ces conclusions dans toutes les études qui ont été faites par l’OMS (Organisation mondiale de la santé)”.
Qui peut parler d’éducation relationnelle, affective et sexuelle?
Tout le monde évidemment. Mais ce n’est pas toujours facile de trouver les mots justes. “Il est important de rappeler que tout le personnel scolaire n’est absolument pas formé à parler de sexualité. Ils sont mal à l’aise et donc ne sont pas toujours de très bon relais. Il a y énormément de freins successifs comme ceux-là, mais on a des déclarations politiques régionales et communautaires plutôt favorables à l’EVRAS”.
L’idéal serait que les futurs enseignants reçoivent automatiquement une formation à l’EVRAS durant leurs études, mais ce n’est pas toujours le cas. “Ce n’est évidemment pas facile pour un enseignant de répondre à des questions qui touchent à l’intimité avec des élèves qu’ils ont toute la semaine. Et même pour les élèves, ce n’est pas évident, donc c’est chouette qu’il y ait des personnes tierces qui interviennent pour ces sujets”. Oui, mais le suivi est lui aussi très important. “C’est toujours plus sympa quand les enseignants peuvent faire le relais s’il y a des questions qui surgissent après les animations”, précise Lola Clavreul-Prat.
Pourquoi parle-t-on si peu de ces sujets à l’école?
Comme expliqué plus haut, le corps professoral n’est pas formé pour parler d’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle. Mais l’un des autres freins est le manque de financement. “Les plannings ont cette mission d’aller faire des animations EVRAS dans les écoles, mais ils ne sont pas suffisamment financés. Malheureusement, aujourd’hui on ne sait même pas répondre à la demande sur tout le territoire belge, c’est impossible. Il n’y a pas assez de personnel et de temps”.
Quand est-on confronté à l’EVRAS?
Généralement, les jeunes sont confrontés à des ateliers ou des discussions concernant l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle au sein de leur établissement scolaire, mais aussi lors d’événements, comme les festivals par exemple. “Durant l’été, sur les festivals, on rencontre surtout des jeunes ayant entre 14 et 30 ans. On aborde principalement les notions de consentement et de harcèlement. Souvent, les filles nous disent qu’elles n’ont jamais été harcelées. Puis, quand les animateurs expliquent ce qu’est le harcèlement, elles se rendent compte que oui, cela leur est arrivé. Lorsque les animateurs abordent la question de la circulation des femmes dans l’espace public, en fait 100% des femmes ont déjà connu cette situation de harcèlement dans les transports, dans la rue… C’est un vrai problème de société. Ce sont des notions qui ne sont pas acquises, il y a beaucoup de choses à déconstruire. C’est pour ça qu’il faut pousser pour qu’il y ait plus d’EVRAS”.
En pratique, ça se passe comment?
Parler d’EVRAS se fait via un tas de moyens: la discussion, les activités, les conférences, les jeux… “En éducation permanente, l’idée, c’est de pouvoir ouvrir des débats publics et susciter l’esprit critique. On ne veut pas juste apporter du contenu théorique. Ce n’est pas le but. On veut proposer des supports qui vont ouvrir à une réflexion personnelle, critique…”.
Tout dépend de l’âge des élèves, de la dynamique de la classe, mais aussi des animateurs. Il y a différents stades.
Chez les petits
En maternelle et au début des primaires, “on va évoquer les émotions, l’intimité ‘comment moi, je fais respecter ma petite bulle. Et comment je respecte celle de l’autre’. Ce sont plus des questions de vivre ensemble”. Souvent, les questions liées à la naissance apparaissent. “On parle alors un peu de reproduction, on donne des réponses liées à notre corps”. C’est aussi l’âge où l’on peut poser les bases du consentement. “Savoir dire oui, savoir dire non, faire respecter ce non”. Et puis, on va évoquer la notion de plaisir via les sensations. “Où est-ce qu’on peut toucher? Qui peut toucher qui? Où et quand? On n’est pas obligé d’utiliser des consensus avec les enfants, certains vont être très à l’aise avec leur corps, d’autres moins, cela dépend de la culture familiale. Cela permet aussi de montrer qu’il y a une diversité dans la classe et on va pouvoir en discuter”.
Chez les plus grands
En fin de primaire, ce sont les questions liées à la puberté qui sont abordées. “On va davantage évoquer le fonctionnement du corps, et le champ est vaste”. En secondaire, voire même en fin de primaire, c’est la pornographie qui est mise en avant. Tout comme l’intimité, la puberté, le consentement et l’hypersexualisation. Le tout grâce à des jeux de cartes, de plateaux ou des discussions.
“Nous avons par exemple ‘Anatomia’, un outil sur le fonctionnement des organes génitaux. On s’est rendu compte que dans les cours de sciences ou de biologie, on aborde toujours la sexualité sous l’angle de la reproduction et jamais on ne parle des phénomènes de désir et de plaisir. Grâce à ce jeu, les élèves comprennent ce qu’est un orgasme, comment ça fonctionne… On sait que le clitoris a été absent durant très longtemps des manuels scolaires, mais les gens sont loin de connaître vraiment leur corps et leurs organes. Nous avons voulu montrer, grâce à ce jeu, qu’il y a beaucoup de similarités entre les organes mâles et femelles”. Chaque thème dispose de son propre jeu.
La Fédération des Centres Pluralistes de Planning Familial met en location ses différents dispositifs pour les professionnels de l’éducation, ou même pour les parents qui souhaitent parler de relation, de sexualité ou de vie affective avec leurs enfants. Rendez-vous ici pour découvrir le catalogue complet.
Plus d’infos: rendez-vous sur le site de la Fédération des Centres Pluralistes de Planning Familial.
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