“Je lui ai fait un enfant dans le dos”
Dorothée est l’heureuse maman de Clara, 3 ans. Si la quadragénaire vit sa maternité comme un grand bonheur, sa grossesse est le fruit d’un leurre. Le papa est convaincu d’un accident de pilule.
“Je ne suis pas fière de ce que j’ai fait, et pour être honnête, je ne pensais pas être un jour capable de mentir à ce point, mais voilà, je ne regrette absolument pas…”, nous dit Dorothée*, 41 ans, d’une voix assurée. Car si cette Bruxelloise a toujours rêvé d’être maman, la vie ne lui avait jusque là pas donné l’opportunité de fonder une famille. “J’enchaînais les relations un peu, voire très, foireuses: des hommes qui ne voulaient pas s’engager, des mecs en couple qui ne m’annonçaient leur situation qu’après avoir consommé… Ma plus longue histoire n’avait duré que huit mois, et mon ex s’était enfui la veille de notre emménagement, une location pour laquelle nous nous étions engagés à deux. Bref, à 36 ans, je n’avais ni mari ni enfant”.
Une envie folle
Si la trentenaire voyait son célibat comme une situation confortable, elle souffre de plus en plus de ne pas être mère: “Plusieurs amies étaient en pleine séparation et se plaignaient d’avoir eu un bébé avec leur ex, d’autres, d’être mères célibataires. Mais moi, je les enviais beaucoup, je comprenais leurs difficultés, mais elles avaient pour moi la chance incroyable d’être mamans”.
Un matin, alors que la jeune femme sort de chez sa psy, elle est résolue à ne plus subir et à faire un bébé toute seule: “J’en ai eu marre de souffrir, je voulais un bébé par-dessus tout. Alors je me suis renseignée sur les démarches à suivre pour faire un enfant via un don de sperme et une PMA”.
Le plan B?
Dorothée entreprend de lire pas mal de témoignages de femmes ayant eu recours au don de sperme et s’intéresse à leurs histoires de vie: “Beaucoup avaient un parcours similaire au mien, une vie amoureuse décevante et un désir ardent de devenir maman”. Dorothée est en effet loin d’être la seule à envisager de faire un bébé seule, puisque 700 à 800 femmes belges ont recours chaque année à la procréation médicalement assistée (pour PMA). Mais alors qu’elle entame les démarches, Dorothée fait une rencontre qui va chambouler ses plans.
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L’homme qui change tout
Dorothée a 37 ans et s’apprête à faire une stimulation ovarienne quand elle se rapproche de Manu*, de deux ans son cadet: “Lui et moi, on se connaissait depuis quelques années déjà, vu qu’on travaillait dans la même boîte, et je dois dire qu’il me plaisait beaucoup. Mais il y a vraiment eu un déclic quand il a été transféré dans la même région que moi. On a eu une sorte de coup de foudre, amical d’abord, puis amoureux”.
Je lui ai parlé de mon désir profond de devenir mère, et il m’a dit qu’il rêvait, lui aussi, de devenir papa
Les collègues se tournent autour pendant quelques semaines, avant de tenter le coup. “C’était très excitant: on se voyait en cachette pendant la pause déjeuner, on s’attendait dans le parking après le boulot… Lui sortait d’une très longue relation, et moi, je galérais depuis des années, donc. Entre nous, tout était facile, sans prise de tête et surtout, on était raides dingues l’un de l’autre. Alors j’avoue, je n’ai pas trop réfléchi: je me suis lancée à corps perdu dans cette histoire. Lui disait être très amoureux et vouloir s’engager vite. Je lui ai donc parlé de mon désir profond de devenir mère, et il m’a dit qu’il rêvait, lui aussi, de devenir papa”.
Quand Dorothée évoque à Manu son projet de faire un enfant seule, ce dernier lui propose de “le faire à deux, ce petit bébé”. “J’avais des étoiles plein les yeux, et sur son conseil, j’ai mis en pause la procédure de PMA dans laquelle je m’étais engagée pour faire un bébé avec cet homme que j’aimais”.
Des mois de doutes
Manu s’installe chez Dorothée et le couple se lance dans des essais bébé. Mais très vite, l’homme doute et demande de faire une pause dans ce projet de vie: “Il vivait une période difficile, car le divorce avec sa femme se déroulait mal et prenait plus de temps que prévu. Alors il m’a demandé de reprendre la pilule quelques mois, le temps que tout cela soit derrière lui. J’ai cru tomber! Ce bébé, je le désirais depuis si longtemps, et alors que je touchais du doigt mon rêve de devenir maman, j’avais l’impression qu’à nouveau, il s’éloignait de moi. J’avais stoppé la procédure de PMA pour lui!”.
Dorothée hésite: reprendre son projet en solo au risque de perdre l’homme qu’elle aime ou attendre qu’il soit prêt et prendre cette fameuse pilule.
La prise impossible
“J’ai consulté mon gynéco pour qu’il me prescrive une micro-pilule, pas trop invasive”. Si la jeune femme va jusqu’à l’acheter, elle ne la prendra jamais: “C’est comme si c’était impossible pour moi…”. Le mois d’après, le signe est clair: Dorothée est enceinte! “J’étais vraiment heureuse… Et en même temps, j’avais l’impression d’avoir fait quelque chose de mal, comme une grosse bêtise”.
Dorothée prendra un mois pour réfléchir à la meilleure façon d’annoncer la nouvelle à Manu. Elle l’a floué, comment lui dire? “Je lui avais assuré avoir pris la pilule le mois d’avant, alors j’ai décidé de mentir et de lui faire croire que cette micro-pilule n’avait pas fonctionné pour moi”. Une excuse qui passe comme une lettre à la poste: “Il m’a crue, et mon gynéco a confirmé que cela arrivait parfois, le premier mois de la prise”.
Comme vide et absent
Le futur papa comprend très vite que sa compagne ne mettra pas un terme à cette grossesse qu’elle désire depuis trop longtemps. Il tente de s’investir comme il peut… mais le cœur n’y est pas. “Il venait avec moi aux rendez-vous médicaux, et essayait de se réjouir de cette petite fille qui arrivait, mais il était comme vide et absent”. Dorothée porte sa relation et cette grossesse à bout de bras, mais le couple finit par sombrer: “J’ai tout fait pour lui donner envie d’avoir ce bébé autant que moi, et avec moi. Mais il m’avouera plus tard s’être ’emballé trop vite’ dans le projet, et que même s’il m’aimait vraiment, il n’arrivait pas à oublier son ex-femme”.
Morte de trouille
Clara* naît et le couple se sépare quelques semaines après: “Il a déménagé et a posé sa démission, afin de ne plus travailler dans la même société que moi”. Dorothée se retrouve seule avec un nourrisson. Elle est morte de trouille, mais éprouve un sentiment de victoire, puisqu’après tout: elle est maman et c’était son rêve. Du reste, Dorothée galère beaucoup en tant que parent solo: “J’avais clairement sous-estimé la charge d’éduquer un bébé seule, d’autant que je vivais assez loin de ma famille. J’ai craqué plusieurs fois, mais j’ai fini par trouver du soutien dans des groupes de paroles sur les réseaux où sont inscrites des mamans dans ma situation. J’ai rencontré des mères solos de ma région aussi, et on s’est épaulées. J’ai ensuite cherché un boulot plus près de ma ville natale, ce qui m’a rapprochée du domicile de mes parents”. Un choix qui a radicalement facilité la vie de la petite famille.
Le secret est toujours inavoué
Quant à Manu, il est aux abonnés absents: “Il n’a pas reconnu Clara, et je n’ai pas pu compter sur lui pour quoi que ce soit. En deux ans et demi, il l’a vue deux fois, dont une fois par le plus grand des hasards. Il est de nouveau en couple avec son ex-femme, et c’est comme si Clara et moi n’avions jamais existé. J’ai su par une ancienne collègue que sa compagne n’était pas du tout au courant qu’il avait une fille. Cela nous fait deux points communs: notre fille, et un secret inavoué”.
Cela nous fait 2 points communs: notre fille, et un secret inavoué
Dorothée consacre son quotidien et son énergie à Clara, et n’envisage pas de se remettre en couple: “J’ai une super vie: une fille merveilleuse, un boulot que j’aime, des parents présents et qui comblent ma petite d’amour. Au vu de mes expériences, je n’envisage pas de m’investir dans une relation amoureuse. En réalité, j’ai été tellement déçue par les hommes que je préfère me préserver et préserver mon enfant. Ma vie de maman me comble de bonheur, et cela me suffit amplement”.
*Prénoms d’emprunt
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