Ils ont trouvé l’amour dans les bras d’un HP
D’après les études relayées par Monique de Kermadec dans son livre Le Surdoué et l’Amour, les couples de HP connaîtraient un taux de divorce moins élevé que ceux composés d’un HP et d’un non-HP. Décryptage d’une psy.
Les opposés s’attirent? Peut-être, mais pour vivre une histoire d’amour durable et épanouissante, il faudrait plutôt croire à l’autre célèbre adage: qui se ressemble s’assemble. Ce constat vaut aussi pour les personnes diagnostiquées Haut Potentiel. Plusieurs études, comme celle menée par le Roeper Institute (Michigan, États-Unis), le démontrent: les couples composés de deux “surdoués” divorceraient moins. Partageant la même perception du monde, une insatiable curiosité, une sensibilité exacerbée ou encore un esprit vif, ils seraient sur la même longueur d’ondes… Ce qui facilite la vie.
Des signes repérables chez l’autre
Allan et Amélie se sont rencontrés par écran interposé, en 2017. Dès les premiers messages, une complicité évidente naît. Une connexion intense qui pousse les jeunes à balayer d’un revers les 400 kilomètres et la frontière qui les séparent. “J’ai ressenti une connexion spéciale entre nous”, nous explique Allan. “Malgré la distance – je résidais à Amay, elle à Paris –, nous avons réussi à construire une relation. Nos conversations Skype pouvaient durer plus de cinq heures. Nous avions tant de choses à nous raconter”, ajoute Amélie.
Captivé par ces échanges prometteurs, le jeune homme, alors âgé de 18 ans, planifie un voyage à Paris. “J’étais extrêmement casanier, je n’étais jamais parti seul, donc j’ai un peu surpris mes parents quand je leur ai annoncé que je partais en week-end sur un coup de tête”. Après sept heures de bus, la rencontre tant attendue arrive enfin. Au début, la timidité prend le dessus, mais le deuxième jour, c’est le vrai coup de foudre. “Et nous avons décidé de nous mettre en couple malgré la distance”, explique Amélie.
Je l’ai trouvé très intéressant et intelligent. J’avais l’impression que nous étions connectés
Diagnostiqué HP depuis ses 12 ans, Allan perçoit rapidement des signes de Haut Potentiel chez Amélie. “Son intelligence exceptionnelle a immédiatement attiré mon attention. J’étais admiratif face à sa capacité à analyser les situations avec clarté et à avoir des opinions réfléchies sur une multitude de sujets. Chaque conversation avec elle est une source d’apprentissage et d’enrichissement. Elle est avide de nouveautés, toujours prête à explorer d’autres horizons. Je pense que le fait qu’elle soit HP m’a aussi séduit”. Amélie pointe elle aussi ce puissant lien intellectuel: “Je l’ai trouvé très intéressant et intelligent. J’avais l’impression que nous étions connectés”.
Un passé compliqué
Les deux amoureux n’en sont pas à leur première relation. Après avoir fréquenté des personnes HP et non HP, Allan estime aujourd’hui qu’il est plus simple de construire une relation avec une partenaire qui partage ses spécificités. “C’est plus facile, car nous n’avons pas besoin de nous adapter. Nous pouvons être nous-même, sans masque, avec nos difficultés. Nous ne devons pas constamment les affronter pour faire plaisir à notre partenaire”. Amélie nuance: “Je ne sais pas si c’est plus facile, mais en tout cas, je ne m’ennuie jamais dans ma relation actuelle. Je me sens totalement épanouie. Il arrive que la communication soit difficile, mais en tant que personnes TDAH et/ou autistes (voir encadré ci-dessous, ndlr), c’est plutôt normal”.
Lire aussi: Les HP sont-ils vraiment plus intelligents?
Le souci, c’est l’ennui?
Si Amélie souligne la forte connexion émotionnelle et intellectuelle qu’elle partage avec son conjoint, elle sait qu’une relation entre deux HP peut aussi susciter des conflits. “J’ai eu une relation d’un an avec un autre HP. À l’époque, je n’avais pas encore passé de test de QI. Mon ancien compagnon se disait ‘surdoué’ et passait son temps à me rappeler que j’étais moins intelligente que lui. Il me répétait que je ne pouvais pas comprendre à quel point la vie de HP était compliquée”, se souvient-elle.
Et de poursuivre: “Beaucoup de personnes HP considèrent qu’avoir un QI élevé constitue une sorte de diagnostic qui les place en marge, mais c’est complètement faux. Selon moi, être HP ne change rien, si ce n’est que nous avons plus de chances d’être sur le spectre de l’autisme ou d’avoir un trouble du déficit de l’attention, ce qui est mon cas. Dans mes précédentes relations avec des non-HP, on ne m’a jamais rabaissée, je n’ai pas non plus eu de problèmes de communication, mais il m’arrivait de m’ennuyer, oui. Raison pour laquelle ça ne durait jamais longtemps”.
Un réseau social dédié
Comme les personnes Haut Potentiel représentent 2% de la population, la probabilité que deux HP célibataires se rencontrent est assez faible. Sans compter la nécessité de compatibilité amoureuse. Pour donner un coup de pouce au destin, David a lancé le réseau social Atypikoo, une plateforme de rencontres amicales ou amoureuses dédiée aux personnes neuro-atypiques comme les HP ou les personnes concernées par un TSA (trouble du spectre autistique). Les participants peuvent échanger et se retrouver lors d’événements.
Aujourd’hui, la plateforme compte plus de 30.000 inscrits. “Mon compagnon a créé ce site il y a quatre ans, raconte Delphine. Il venait d’apprendre qu’il était HPI et avait envie de rencontrer des personnes qui partageaient son fonctionnement. David peut se vanter d’avoir participé à la création de plusieurs couples et de deux bébés Atypikoo”.
Surdoués amoureux: les conseils de la psy
Plus sensibles, plus créatives, plus empathiques, plus curieuses: les personnes HP vivent dans un tourbillon d’émotions. Elles souffrent souvent, aussi, d’un sentiment de décalage. Autant d’éléments qui ne facilitent pas la quête de l’âme-sœur. Comment se montrer vulnérable et se lancer dans une histoire quand on se sent aussi perméable aux émotions qui nous entourent? Leur perfectionnisme complique encore un peu plus la tâche.
Perfectionnisme relationnel
Catherine Devreux, psychologue et responsable de l’asbl Relaxeau (un centre bruxellois spécialisé dans le Haut Potentiel) parle de perfectionnisme relationnel. “Le HP est souvent exigeant vis-à-vis de lui-même, mais aussi vis-à-vis des autres. Il a aussi beaucoup de lucidité et quand il perçoit une faille chez l’autre, très vite, cela devient impossible”, détaille la psychologue. Le HP est également un grand sensible. “Son hyperémotivité est teintée de beaucoup de susceptibilité. Si on ne communique pas, les conflits peuvent surgir et laisser de grosses blessures alors que l’autre ne voulait pas spécialement faire mal”.
Une histoire d’amour peut évidemment marcher, pour autant que l’autre tombe le masque dès le début
Attention au faux-self
Autre obstacle pointé par la spécialiste: le faux-self, ce masque que le HP a pris l’habitude d’enfiler pour s’intégrer plus facilement. “Le faux-self est le fait de tout faire pour être reconnu et aimé. On met un masque, on n’est plus soi, cela entraîne une grosse fatigue relationnelle”.
Pour l’experte, qui est aussi l’auteure de Haut Potentiel: du boulet au cadeau, un couple qui s’est construit sur base de ce faux-self ne peut pas durer. “La personne qui est dans le faux-self peut soit le rester, mais cela engendrera de grosses souffrances, soit décider de se montrer comme elle est, mais dans ce cas, l’autre découvrira une toute autre personne qu’il n’aimera peut-être pas de la même manière”. Comprenez: une histoire d’amour avec un HP peut évidemment marcher, pour autant que l’autre tombe le masque dès le début.
HP et non-HP: l’équation impossible?
À lire ces témoignages, on en viendrait à douter que HP et non-HP puissent construire une relation solide. Or, ces couples ont évidemment des chances de fonctionner, à condition de faire preuve d’écoute et d’ouverture d’esprit pour comprendre le fonctionnement de l’autre. Un équilibre que Cécilia, en couple avec Romain, a mis un peu de temps à trouver.
Il manque souvent de tact, se pose énormément de questions. Il est notamment terrorisé à l’idée de faire un mauvais choix…
“Il est HP, mais pas moi. Après un an, nous avons eu une grosse dispute, j’ai appris que certains de mes propos, qui me paraissaient anodins, l’avaient blessé. Il n’osait pas m’en parler, car il redoutait ma réaction, ses précédentes partenaires lui reprochaient son hypersensibilité. Nous avons tout mis à plat et instauré un meilleur système de communication. Me concernant, il manque souvent de tact. Il se pose aussi énormément de questions, il est notamment terrorisé à l’idée de faire un mauvais choix. Cela m’agaçait autrefois, car il s’attardait vraiment sur des détails. Avec le temps, je comprends mieux son perfectionnisme. J’essaie de rester bienveillante, mais aussi terre à terre. Je le laisse exprimer ses peurs mais je suis réaliste en rappelant qu’il n’y a pas de mauvais choix et qu’il doit se décider. Lui n’aime pas les sorties entre amis, mais il a compris qu’elles étaient importantes pour moi. Notre relation est très enrichissante, nous faisons tout pour partager des moments à deux, mais aussi pour s’offrir des pauses en solo afin de répondre à nos propres besoins”.
“Je ne pense pas que ce soit réellement différent d’un couple classique, conclut Catherine Devreux. Construire un couple est toujours un chemin sinueux. La clé est de pouvoir communiquer”.
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