Témoignage: “Faire un bébé a tué notre libido”
Laurence et son compagnon ont éprouvé beaucoup de difficulté à devenir parents. Un parcours médicalisé et fastidieux qui a mis à mal le désir qu’ils éprouvaient l’un pour l’autre. Témoignage.
On dit souvent qu’être parents peut freiner la libido des couples, même les plus amoureux. Entre le travail, l’éducation des enfants, la charge mentale à se diviser, les nuits parfois compliquées et un quotidien souvent rythmé, il peut être difficile pour des jeunes parents de trouver du temps pour des moments d’intimité. En particulier lorsque la fatigue est à son comble… Mais cette baisse de désir n’est pas l’apanage de ceux qui sont devenus parents. Il arrive parfois que dès la conception et la grossesse, la libido disparaisse. C’est ce qui est arrivé à Laurence et son compagnon, parents de jumeaux qui, depuis leur parcours hyper-médicalisé pour avoir des enfants, n’arrivent plus à faire renaître le désir qu’ils éprouvaient jadis l’un pour l’autre.
“Nous n’avons plus eu de relation sexuelle depuis ma grossesse”
“D’aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours souhaité devenir maman. Mais ce n’était pas une priorité pour autant… Je m’étais fixé plusieurs objectifs avant de devenir mère: terminer mes études, partir vivre à l’étranger, accumuler les expériences professionnelles et aussi trouver une personne avec qui je voudrais vraiment vivre une parentalité”. Des rêves que Laurence réalise avant ses 35 ans: son diplôme en poche, elle part vivre à Londres et décroche un boulot dans une entreprise internationale dans laquelle elle est amenée à voyager très souvent. Tous, sauf un: rencontrer la personne avec laquelle elle fonderait une famille. “J’ai vu certaines de mes amies s’engager dans des relations qui ne les rendaient pas heureuses, et malgré tout faire des enfants. Et si je pouvais comprendre leur choix, ce n’était pas ce que je désirais… Ni pour moi, ni pour mes futurs enfants”.
Une rencontre sur le tard… et des difficultés à tomber enceinte
De retour en Belgique, Laurence rencontre celui qui deviendra l’homme de sa vie. Elle a 38 ans, lui 40 ans et tout va très vite entre eux: “J’avais prévu de ne rester que quelques mois avant de partir m’installer dans un autre pays. Mais la rencontre avec Pascal a changé tous mes plans: quinze jours après notre premier rendez-vous, je me suis installée chez lui, et on ne s’est plus jamais quittés. Papa d’un pré-ado dont il a la garde 5 jours sur 15, Pascal confie qu’il n’est pas contre l’idée d’avoir un autre enfant. Un an plus tard, le couple se lance dans les essais bébé. Mais les choses ne se passent pas aussi facilement qu’ils l’auraient voulu.
“Après 15 mois de tentatives infructueuses, j’ai pris rendez-vous chez un gynécologue afin de savoir pourquoi je ne tombais pas enceinte. Il m’a simplement dit qu’à mon âge, c’était souvent plus compliqué, et il nous a fait passer une horde de tests de fécondité, à Pascal et à moi. C’est là que notre désir a commencé à disparaître”.
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Une sexualité trop médicalisée
Très vite, le couple se retrouve dans la spirale des rendez-vous médicaux à répétition: échographie, prise de sang, hystérographie, spermogramme… Laurence a parfois l’impression de passer plus de temps à l’hôpital que chez elle. Un sentiment qui ne fait que grandir lorsque le gynécologue lui annonce qu’elle devrait passer par un traitement hormonal afin de stimuler ses ovaires à produire des ovules. Si cela ne fonctionnait pas, ils devraient passer par la Fécondation In Vitro pour espérer avoir un bébé.
Les complications liées à ce projet bébé commencent à peser lourd et empiètent sur leur libido. “Notre sexualité avait un but précis désormais: que je tombe enceinte. Il fallait compter les jours, se retenir ou faire l’amour un jour bien précis… C’était tout sauf spontané! Ajoutez à cela les injections d’hormones que je prenais pour booster ma fertilité – qui me rendait très sensible et malade – et vous comprendrez comment notre libido a, peu à peu, fondu comme neige au soleil. On ne faisait pas l’amour par désir, mais par obligation”.
On ne faisait pas l’amour par désir, mais par obligation.
Une grossesse compliquée qui enterre le désir
Quelques mois plus tard, Laurence tombe enceinte. Une victoire et un soulagement pour le couple. Laurence et Pascal s’imaginent pouvoir enfin vivre leur vie loin des hôpitaux, des rendez-vous médicaux et retrouver un peu de temps pour eux. C’était sans compter la grossesse gémellaire qui, additionné à l’âge de la future maman, fut plus difficile que prévue: “Les médecins m’avaient prévenue que lorsque les ovaires sont stimulés artificiellement, les risques d’avoir des jumeaux étaient plus important. Mais on ne s’imaginait pas que cela nous arriverait. Quand on nous a annoncé qu’il y avait deux bébés, on a éprouvé un mélange de bonheur et de peur de ne pas être à la hauteur… Mais on était loin de se douter que ma grossesse serait aussi compliquée”.
Douleurs, contractions, tension élevée, col qui rétrécit… Laurence doit se reposer un maximum pour garder les bébés au chaud, et faire des examens très réguliers. Une difficulté de plus pour les amoureux qui n’arrivent pas à faire renaître le désir. “On était stressés par la situation, et cette grossesse ultra-médicalisée n’aidait en rien: elle nous empêchait de relâcher la pression et de retrouver une quelconque envie. Le médecin nous a déconseillé la pénétration. On s’est bien caressé un peu, mais c’est comme si on n’arrivait plus à se reconnecter. Alors on s’est dit qu’on s’aimait fort, mais qu’on attendrait que les bébés soient nés pour faire à nouveau l’amour… En réalité, on n’a plus jamais fait l’amour depuis”.
Deux ans sans faire l’amour
Laurence est catégorique: vouloir un bébé a tué la libido de leur couple. “L’infertilité, les examens médicaux, la grossesse à risque et une année en tant que parents de jumeaux ont vraiment éteint ce désir qu’on avait l’un pour l’autre. Nos enfants ont 13 mois et on n’a plus fait l’amour en le désirant vraiment depuis des lustres… et notre libido peine vraiment à revenir”. Pour résoudre leur problème, les jeunes parents ont décidé de suivre une thérapie de couple. “On s’aime toujours. On le sait, on se le dit souvent, même si le fait qu’on ne partage plus de moments intimes nous a forcément éloignés. Alors on a pris rendez-vous chez un sexologue. On a besoin d’aide, on le sait”.
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