Infertilité: comment ne pas culpabiliser?
Parmi les sentiments qui assaillent les couples vivant l’infertilité, celui de la culpabilité est certainement l’un des plus anxiogènes. Une psychologue spécialisée en périnatalité nous explique comment la surmonter, pour vivre cette épreuve plus sereinement.
Rien qu’en Belgique, près d’un couple sur 5 est confronté à des difficultés pour concevoir un bébé. Une infertilité qui est souvent un choc pour ces personnes en désir d’enfant puisqu’ils voient leur chemin vers la parentalité jonché de protocoles médicaux, de rendez-vous à répétition et de traitements à suivre à la lettre, tandis que d’autres couples accèdent à la parentalité le plus naturellement du monde. De cette différence peut naître une certaine injustice, mais aussi une grande culpabilité. Des sentiments tout à fait légitimes selon Christine Henderickx, psychologue spécialisée en périnatalité, mais qui peuvent être une réelle souffrance.
La culpabilité liée à l’infertilité: ses origines
“Pour comprendre ce sentiment de culpabilité, il est important de faire la différence entre infertilité et stérilité, puisque généralement, la stérilité est connue depuis longtemps, souvent dès la puberté: si cette stérilité touche la femme, celle-ci se rend compte de l’absence de cycles menstruels dès son adolescence… Et après examens, un diagnostic de stérilité est établi. Cette stérilité peut être vécue difficilement, mais n’induit généralement pas de sentiment de culpabilité chez la jeune femme. Cela pourrait être par contre le cas de ses parents, qui peuvent se sentir coupables d’avoir mis au monde un enfant avec une malformation l’empêchant de devenir parent un jour”, nous précise la psychologue.
Le processus est bien différent en cas d’infertilité: “Contrairement à la stérilité, l’infertilité n’est connue que bien plus tard, lorsque le couple met en route un projet de parentalité. Après plusieurs mois et alors que bébé tarde à arriver, ils consultent et découvrent alors que quelque chose cloche. C’est à ce moment que le sentiment de culpabilité survient”.
Une culpabilité qui se traduit de différentes manières
Selon l’experte en périnatalité, la culpabilité de ne pas réussir à avoir un enfant peut se traduire de différentes manières chez la femme en situation d’infertilité:
- Sentiment d’incapacité: on peut se sentir incomplète, voir grandir une sensation d’infériorité à ne pas réussir à tomber enceinte alors que d’autres y arrivent si facilement.
- Se sentir obligée de compenser: on va tout faire pour “mettre les chances de son côté”, comme changer de régime alimentaire (évincer le gluten, le sucre, etc) et s’interdire beaucoup de choses, de peur d’être responsable de cette infertilité. Ce qui, à terme, peut isoler et miner psychologiquement.
- Un besoin d’avoir le contrôle: on peut aussi ressentir un profond besoin de tout contrôler dans le processus de procréation, quitte à ne plus vivre que pour cela.
Chez les hommes, le processus sera quelque peu différent: “De fausses croyances nous poussent à croire que les hommes culpabilisent moins face à l’infertilité, mais sachez que c’est faux. Cela se traduit juste différemment chez eux: souvent, ils se sentent démunis de ne pas réussir à offrir à leur femme ce qu’ils désirent, c’est-à-dire la parentalité”.
Sortir de la culpabilité: les conseils de la thérapeute
S’il est normal de ressentir un tas d’émotions contradictoires en situation d’infertilité, la culpabilité fait partie des sentiments les plus néfastes, tant sur l’individu que sur le couple. Christine Hendericks nous le confirme: “La culpabilité est assez destructrice, car cela nous met dans une situation d’impuissance. Mais c’est une émotion qu’il est possible de travailler, dès lors que l’on désire être acteur de son changement”. Voici les conseils de la spécialiste pour se sentir mieux dans sa tête:
1. Repérer ce qui fait souffrir
Pour sortir de la culpabilité, la première chose à faire est de mettre le doigt sur ce qui fait mal, voir ce qui est carrément insupportable: “Mettre en lumière la souffrance permet de mettre des mots sur les maux ressentis, de verbaliser ce qui est difficile… Tout cela permet de déposer les choses et de prendre de la distance”.
2. Partager avec des personnes bienveillantes
La spécialiste conseille aussi de s’entourer de personnes bienveillantes, à qui l’on pourra parler de cela sans crainte d’être jugée, ni de recevoir des conseils faussement bienveillants: une amie qui a vécu la même chose, un frère à l’écoute, une collègue… Mais aussi des groupes de parole de personnes vivant eux aussi l’infertilité et/ou un suivi psychologique, qui s’avère primordial dès lors qu’il y a souffrance.
Et selon la spécialiste, pas besoin de tout expliquer des démarches que l’on entreprend pour vaincre l’infertilité: “Il peut être utile de garder une certaine intimité, de ne pas informer la famille des dates exactes auxquelles on a tel ou tel rendez-vous. Parce que sans le vouloir, les proches peuvent être oppressants en prenant des nouvelles, alors qu’ils veulent finalement bien faire”.
Autre conseil de la psy: évitez les gens culpabilisants. “Ceux qui disent des généralités du genre: ‘tu y penses trop’, ‘mais lâche prise enfin’… Ne le font pas forcément exprès, mais ils ont tendance à culpabiliser en faisant croire que c’est de notre faute si on est infertile”.
3. S’autoriser des moments sans attentes
Si vivre un parcours de procréation médicalement assistée demande beaucoup de temps et d’énergie, il est aussi important de s’autoriser des moments pour soi, hors de ce projet: aller au restaurant en amoureux, faire du sport, partir en week-end, aller voir des amis… En bref, sortir du chemin médical dans lequel on est plongé pour respirer entre deux rendez-vous.
4. Accepter que cette potentielle grossesse ne soit pas spontanée
Autre étape importante: faire le deuil d’une grossesse naturelle. “Être dans la déception de ne pas réussir à tomber enceinte naturellement induit la culpabilité. Faire preuve de résilience et accepter que notre chemin vers la parentalité soit médicalisé permet de sortir de ce sentiment de culpabilité”.
5. Se féliciter d’avoir le courage de passer par là
Le dernier conseil de la spécialiste est de ne pas oublier d’être bienveillante avec soi-même, et se remercier d’emprunter toutes ces démarches vers la parentalité, aussi difficile cela puisse être physiquement et psychologiquement. “Offrez-vous un moment rien qu’à vous, la robe dont vous rêviez depuis longtemps, votre parfum préféré… L’important est de se féliciter vraiment, d’une manière ou d’une autre”.
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