Enfant: comment accueillir le bulletin?
La fin de l’année nous rapproche des vacances et, avant elles, de l’étape obligatoire du bulletin: gage de bonheur familial s’il est bon… ou de catastrophe s’il est mauvais! Et si on baissait la pression?
Notre peur de l’échec nous pousse parfois à stresser autant que nos enfants lors de la remise du bulletin! Pourtant, «il faut essayer de garder son rôle de parent et accueillir les résultats de la même manière qu’un autre événement, et ne pas trop stresser l’enfant», explique Ron Kelijman, cofondateur de My Sherpa (www.mysherpa.be), une structure qui propose des cours particuliers à domicile. Mais, pourquoi est-ce si difficile?
C’est quoi le bulletin?
Pour Nathalie Vancraeynest, coach et fondatrice de Grandir en confiance (www.grandirenconfiance.be), tout part de la conception que nous avons du bulletin: «Trop de parents partent du principe que le bulletin est le reflet de l’intelligence ou de la valeur de l’enfant. Or, il n’est que le reflet de la maîtrise de l’enfant dans différentes matières à un moment donné. La mesure prise au niveau du bulletin dépend de petites choses aussi, ça ne veut pas dire que l’enfant ne comprendra pas plus tard, qu’il ne s’en sortira pas ou qu’il n’est pas intelligent. Ce qui serait intéressant, c’est de recevoir les interrogations et les contrôles en même temps que le bulletin, afin de regarder ensemble d’où vient la note. Evidemment le diplôme est important, mais il est essentiel de voir l’école comme des portes qui peuvent s’ouvrir ou se fermer. Mon expérience me montre que les qualités valorisées à l’école sont inversement proportionnelles aux qualités nécessaires dans la vie professionnelle.» Intéressant!
Analyser l’effort
Florence, maman de Jade, 15 ans, se souvient: «Une année, ma fille avait de très mauvais points en maths. Elle a eu un examen de passage et nous lui avons payé des cours particuliers pour l’y préparer. Elle a raté son examen, avec des points inférieurs à son examen de juin. On était consternés. Pourtant l’année d’après au premier bulletin elle avait 19 de moyenne. Incompréhensible! Il devait donc y avoir eu un autre problème.» On fait trop souvent un raccourci: mauvais points égalent manque de travail. Or beaucoup d’enfants ne sont pas conscients de la façon dont ils apprennent. De plus, ils doivent tous apprendre au même rythme, ce qui est loin d’être le reflet de la réalité. Pour Ron Kelijman, «à l’école ils apprennent des matières, mais ils n’apprennent pas à apprendre. Certains élèves sont de très bonne volonté et pourtant les résultats ne suivent pas.» Enfin, le bulletin ne dit rien sur les efforts fournis par l’enfant. Un échec peut être lié à un manque de maturité, à une mauvaise méthode d’apprentissage, au stress de l’examen ou à un problème personnel.
Donner l’envie de savoir
Un enfant en primaire aura surtout envie de faire plaisir à papa et maman. En secondaire, l’école doit avoir un sens, devenir un projet afin que la motivation vienne de l’enfant. Malheureusement, souvent l’angoisse de déplaire prend le dessus. Tout l’enjeu éducatif est donc de mettre l’enfant en projet, l’impliquer dans ses études, voir ce qu’elles représentent pour lui. Dire: «Avec un bulletin comme ça, tu n’arriveras à rien» est extrêmement cassant, et ne l’aide pas à croire en lui pour devenir l’adulte qu’il veut être. Pour Nathalie Vancraeynest, «l’obligation de réussite tue l’envie de savoir. La plupart des élèves n’attribuent pas de valeur à l’école, ils ne sont pas motivés». Dans son travail avec les jeunes, elle part souvent d’une activité qu’ils aiment: «Regarde, au foot tu réussis, tu as une stratégie.» En faisant le parallèle avec la stratégie de réussite qu’ils mettent en place dans une activité qu’ils aiment, il serait possible de retravailler la motivation, qui est plus de la moitié de la réussite scolaire.
Protéger, pas s’opposer
«Surtout, il faut dédramatiser!» dit Nathalie Vancraeynest. Pour Ron Kelijman, le parent doit jouer son rôle protecteur, ne pas se mettre en opposition: «J’observe une grande tendance à l’opposition. En réaction à celle-ci, l’enfant se referme. Vous pouvez avoir des points de vue différents, mais l’opposition sépare. Or, soutenir votre enfant ne veut pas dire que vous approuvez.» En revanche, n’ayez pas peur d’exprimer vos craintes, car elles sont bien là et nous les projetons souvent sur nos enfants sans nous en rendre compte. Les exprimer permet la prise de recul. Pour bien faire, demandez-lui comment il perçoit ce bulletin, s’il est satisfait par rapport au travail qu’il a fourni. Revoyez les objectifs ensemble, laissez poser et reparlez-en le lendemain. Car le bulletin, ce n’est que le point de départ du travail que l’on peut mettre en place avec l’enfant. «C’est important de leur faire comprendre que la réussite leur appartient», explique encore la coach Nathalie Vancraeynest. «Souvent, ils conçoivent les notes comme quelque chose qui leur échappe.» Bon ou mauvais bulletin, restez positive et passer autant de temps à parler des bons points que des médiocres. Complimenter l’enfant, c’est réalimenter le circuit du plaisir en donnant de l’importance à leur fierté et à notre reconnaissance.
Une punition ou une récompense?
Cela serait inutile! Pour Ron Kelijman, «dans la plupart des cas, le jeune se rend compte de l’impact et des conséquences d’une mauvaise note. La mauvaise note est la sanction en soi. Le resanctionner n’aura pas l’effet escompté. C’est important d’être constructif. Du côté des récompenses, c’est personnel, mais des mots qui valorisent sont la belle récompense». La coach confirme: «Le bulletin ne doit pas être soumis à une punition car les notes ne sont pas en soi un comportement. Si tel est le cas, la motivation de l’enfant devient d’éviter la sanction. Quant à la récompense, elle peut donner envie de réussir, mais je ne la recommande pas.»
La communication, encore et toujours!
L’essentiel est de rester à l’écoute afin d’éviter que la discussion ne devienne un monologue de parent à élève. D’autant plus face aux ados qui sont souvent d’emblée en opposition. Et inutile de crier car les cris sont irrespectueux et intimidants, il n’en sort rien de bon. Et Ron Kelijman de conclure: «N’oubliez pas: vous êtes dans la même équipe!»
Texte: Vanessa Jansen