
Comment accompagner son enfant dans la transidentité?
Daphné Coquelle, co-fondatrice de l’association Transkids, nous explique comment accompagner au mieux un enfant trans dans son parcours identitaire, et comment se faire aider en tant que parent.
Depuis le 1er janvier 2025, 6 centres spécialisés permettent aux personnes transgenres d’obtenir un remboursement pour leur accompagnement, qu’il soit psychologique ou médical. Jusqu’à présent, seules deux institutions proposaient ce type de prise en charge: l’UZ Gent et le CHU de Liège. Désormais, quatre nouveaux centres viennent compléter ce dispositif: ZAS Anvers, l’hôpital Erasme à Bruxelles, le ZOL Genk et Vitaz à Sint-Niklaas.
Au-delà de l’accompagnement proposé par ces centres, le rôle de la famille, et en particulier celui des parents, demeure fondamental. Confrontés à une situation qui peut les dépasser, ces derniers peuvent éprouver un profond sentiment d’impuissance. C’est dans cette perspective qu’est née l’association belge Transkids. Son objectif est d’apporter un soutien aux enfants transgenres ainsi qu’à leurs parents, tout en menant des actions de sensibilisation et de formation auprès du grand public et des professionnels de l’enfance sur les enjeux liés à la transidentité.
Ni une lubie ni une maladie
Au printemps 2021, nous avions interviewé Daphné Coquelle, l’une des fondatrices de l’association, elle-même maman d’un enfant transgenre. Elle nous disait: “Avant de vous expliquer ce qu’est la transidentité, il me semble primordial de définir ce que cela n’est pas. Ce n’est ni une maladie, ni une envie, ni un caprice, ni une lubie ou un effet de mode… On naît trans, comme on naît gaucher ou droitier”.
Selon elle, une personne transgenre se définit comme quelqu’un dont le genre assigné à la naissance ne correspond pas à celui du genre ressenti. Et de préciser qu’il est important de faire la distinction entre identité de genre et attirance sexuelle. “L’identité de genre, c’est comment on ressent notre genre: garçon, fille, les deux ou aucun des deux. Ce qui est différent d’une attirance sexuelle, qui définira vers qui on est attiré: les garçons, les filles, les deux ou aucun des deux”.
Formuler ou rejeter son identité
“Certains enfants peuvent exprimer leur transidentité très jeunes, vers l’âge de 3 ou 4 ans, précise-t-elle. Souvent, ils commencent, à cet âge-là, à se définir comme étant fille ou garçon. Dans le cas d’un enfant transgenre, il n’est pas rare qu’il dise à son entourage ‘Je suis une fille’ alors que son genre de naissance est masculin, par exemple”.
La transidentité n’est pas une souffrance à partir du moment où elle est reconnue
L’autre signe clair, selon Daphné Coquelle, est de rejeter l’expression de son genre de naissance: “Un enfant trans aura tendance à rejeter ce qui est représentatif de son genre de naissance, et à se tourner vers le genre ressenti”. Attention cependant de ne pas entrer dans les clichés: “Ce n’est pas parce qu’un enfant né fille aime jouer au foot et qu’un enfant né garçon s’amuse avec des poupées qu’il s’agit de signes de transidentité”. Par contre, l’accumulation de certains signes peut mettre la puce à l’oreille, la seule chose à prendre en compte restant ce que l’enfant exprime.
Écouter sans brider
C’est qu’en matière d’identité de genre, seule la parole de l’enfant compte, raison pour laquelle il est important d’être dans l’écoute et de ne pas brider les ressentis évoqués. “Un enfant trans qui n’est pas écouté et soutenu enfouira ses émotions, mais ce n’est pas pour autant que sa transidentité disparaîtra! Il fera semblant pendant un temps, risquera de souffrir beaucoup et de faire face à des problèmes psychologiques”. Daphné Coquelle insiste: “La transidentité n’est pas une souffrance à partir du moment où elle est reconnue”.
“Mon enfant est transgenre”
Lorsqu’un enfant annonce qu’il est transgenre, les parents peuvent avoir l’impression que le ciel leur tombe sur la tête. Ils vont d’ailleurs souvent chercher à “faire évaluer” la situation par un thérapeute. Une démarche inutile selon Daphné Coquelle: “Aucun professionnel de la santé, mentale ou pas, ne peut dire si une personne, adulte ou enfant, est transgenre. Il faut faire confiance à son enfant dans ce qu’il ressent: c’est une personne à part entière. Si votre enfant vous confie qu’il est trans, c’est qu’il l’est”.
1. Dédramatiser la situation
La mère de famille est catégorique: il est inutile d’imaginer qu’il faille renoncer à l’enfant que l’on a mis au monde ou à la relation tissée avec lui. “Un enfant qui confie son ressenti sur son identité de genre exprime juste qui il est. Alors bien sûr, c’est un choc pour nombre de parents, mais on ne doit pas ‘faire le deuil de son enfant’, comme on l’entend souvent. Ce qui est vrai, par contre, c’est qu’on fera le deuil de ce que l’on avait projeté pour son enfant. Mais lui, il est là et bien là, exprimant qui il est vraiment”.
Un enfant qui confie son ressenti sur son identité de genre exprime juste qui il est
Daphné Coquelle nous invite à dédramatiser la situation, et nous confie d’ailleurs qu’un enfant ayant exprimé sa transidentité sera plus apaisé et plus joyeux, dès lors que son entourage le prendra positivement.
2. Se positionner de manière affective
Rappeler à son enfant qu’on l’aime est essentiel: “N’ayez pas peur de dire à votre enfant que peu importe son genre, vous l’aimez pour ce qu’il est, et que vous serez présent(e) dans toutes les étapes de son chemin”, propose Daphné Coquelle. Pour l’enfant, il sera très important de savoir qu’il est aimé et compris, afin d’avancer sur le chemin qui est le sien.
3. Partir à la rencontre d’autres personnes trans
Rencontrer d’autres familles avec des membres transgenres est, selon la fondatrice de Transkids, très bénéfique, en particulier en début de parcours: “Notre association propose des rencontres afin que les familles puissent discuter de ce qu’elles sont en train de vivre, et cela les aide beaucoup! Elles partagent leurs points de vue et leurs difficultés, se conseillent”.
C’est aussi l’occasion de côtoyer des familles qui sont plus avancées dans l’acceptation de la situation et dans les démarches. “Et de rencontrer des adultes transgenres qui ont une vie tout à fait ‘normale’: ils ont fait des études, ont un travail et ont bien souvent fondé une famille… C’est extrêmement rassurant pour nombre de parents”.
4. L’épauler et se faire épauler
Être suivis par un thérapeute, que ce soit en famille ou individuellement, peut être utile pour vivre au mieux la situation. Vous l’aurez compris, pas question de passer par une “expertise” afin de savoir si votre enfant est vraiment transgenre ou pas. “L’idée, c’est d’être accompagnés par un expert afin qu’il vous épaule vous, votre enfant mais aussi votre famille, selon vos besoins: cela peut être pour déposer des émotions, pour apprendre à accepter la situation si c’est difficile, mais aussi pour savoir comment en parler à l’entourage ou appréhender sereinement les démarches à venir”, conclut Daphné Coquelle.
Pour recevoir de l’aide
Votre enfant est transgenre et vous souhaitez être accompagné au mieux dans son parcours identitaire? L’association Transkids peut vous soutenir. Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site de l’ASBL.
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